Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

En toute bonne foi

1 mai 2012

Du pouvoir et de la malhonnêteté de la presse

On peut changer totalement le sens d'une affirmation lorsqu'on la sort de son contexte.
Voir par exemple la vidéo de Hollande sur son statut de privilégié à la cour des comptes, utilisée par Marine Le Pen, maladroitement relayée par notre miss boulette nationale, Nadine Morano.
 
Je ne suis pas parvenu à trouver le reportage, et donc peut-être le contexte original, afin de confirmer que ce n'était pas l'idée qu'il voulait exprimer. Mais j'imagine aisément qu'il ne faut absolument pas se fier aux apparences.
 
De nos jours, et les journalistes excellent en la matière, c'est plus sournois : on choisit toujours de ne retenir que la part qui peut prêter à polémique, laissant la place à une interprétation erronée, voire contraire, de l'idée que le sujet souhaitait exprimer.
 
J'ai écouté Nicolas Sarkozy chez Bourdin (BFMTV/RMC) ce matin.
Voici ce qu'il a dit sur le sujet épineux et central de l'entre-deux tours de l'immigration. Depuis, les seules images qui tournent en boucle sur cette même chaîne (et les autres médias lui emboîteront sans aucun doute le pas), sont un "morceau choisi" de 5 secondes, "y a-t-il trop d'immigrés en France?", "Oui"... Je parierais volontiers sur les titres d'articles de presse à venir, Sarko en gros plan, "Il y a trop d'immigrés en France"... Voyons voir...
 
Ce n'est pas mentir, certes, mais croyez-vous vraiment que l'interprétation sera la même de la part de ceux, largement majoritaires, qui n'auront pas vu l'interview originale? 
 
Faisons simple et clair : cette réponse n'est pas raciste - puisque c'est de ça dont il pourrait être question si l'on s'en tenait, certes avec une mauvaise foi débordante, à l'extrait sorti du contexte - mais je n'ai pas de doute, en ces temps de chasse aux sorcières, que c'est pourtant cet extrait qui restera dans l'inconscient collectif, servant la thèse de ceux qui lui prêteront des idées xénophobes.
 
Je sais bien que ce n'est pas l'exemple le plus flagrant. Ca me conforte juste chaque fois un peu plus dans l'idée que le débat est faussé par les journalistes, lesquels bénéficient d'un pouvoir globalement sous-estimé, lesquels poursuivent leur unique intérêt : que leur travail ait un retentissement (pardon, un buzz) maximum. Que la vérité soit bafouée, rien à foutre.
 
Après cela on reproche aux intervenants de faire preuve de langue de bois, de ne pas répondre aux questions (cf la réponse, ou plutôt l'absence de réponse, de F. Hollande à Pujadas sur le même sujet). Mais c'est compréhensible! Ils savent que leurs propos peuvent vont être détournés.
 
Le résultat? Il est double.
Des sujets sensibles mais néanmoins importants deviennent tabous, et un sujet important qui n'est pas traité par les partis républicains sert la cause des partis extrêmes, c'est évident.
Enfin, le débat en est donc faussé, puisque l'on prête à un candidat des idées qu'il n'a pas, et que des millions de personnes qui ne cherchent pas à en comprendre davantage que ce que les journalistes leur donnent à penser (télé, presse écrite, sites généralistes ou partisans) seront alors influencées dans leur choix par ce qu'il convient d'appeler des manoeuvres malhonnêtes, intéressées.
 
En résumé, je crains que bien des journalistes, qui ne se privent pas de dénoncer les politiques lorsqu'il arrive à ces derniers - et c'est évidemment inadmissible - de servir ponctuellement leur intérêt propre plutôt que l'intérêt général, ne fassent au fond pas autre chose. Je crains même que cette pratique ne soit plus répandue chez les premiers que chez les seconds...
A priori on pourrait considérer que c'est moins grave, presque sans conséquence ; je n'en suis pas convaincu. 
Ils ont un pouvoir démesuré alors qu'ils ne sont pas élus.
Le public leur prête une crédibilité qu'ils ne méritent souvent pas.
Trop font preuve d'une malhonnêteté sous-estimée, que ce soit dans un intérêt particulier (le journaliste lui-même), quand qu'il ne s'agit pas d'un intérêt supérieur (le journal, la chaîne, le groupe qui la détient, le lobby ou le candidat que celui-ci soutient...)
Et leur action peut définir l'opinion d'un peuple, faire pencher la balance d'un côté ou de l'autre lors d'élections, et influer donc directement sur les décisions politiques, l'avenir d'un pays.
Mes chers concitoyens, forgez-vous vos opinions par vous-mêmes. Courage, car c'est très très dur. Il y aura toujours un intermédiaire, qui interprètera plus ou moins les faits, et vous influencera alors plus ou moins dans votre prise de position.
Mais ça sera toujours mieux que de se laisser séduire, souvent par facilité, par ces idées trop communément admises : rien n'est jamais tout noir ou tout blanc.
Publicité
Publicité
En toute bonne foi
  • Sans parti pris, analyse de l'actualité quelle qu'elle soit, de la société, de la politique... N'ayant pas la prétention d'être un expert dans quelque domaine abordé que ce soit, je n'ai à mon bénéfice que ma bonne foi, mais c'est devenu tellement rare...
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Archives
Publicité